HASSAN… Du sens et de la punchline au service de vraies valeurs !


GHETTOBLASTER : n.c, lecteur de musique emblématique de la culture Hip Hop à ses débuts, connu pour sa taille démesurée et pour sa puissance de son conséquente ;
n.p, titre d’un morceau du rappeur Hassan, présent sur son EP « Warm UP », dont le clip tourne sur le net. 

Début 2011, Hassan est finaliste du Buzz Booster, un tremplin national de rap. A la fin de cette même année, il sort son premier EP Warm Up, réalisé en collaboration avec Enzoo, beatmaker de l’équipe « Perpi’Zoo » (Nemir, Gros Mo, Carlito Blanc…). Warm Up est comme un tour d’échauffement pour prendre la température, avoir un retour du public… La démarche de ce projet est de renouer avec les années 90, tout en s’inspirant de l’époque actuelle.

 

 

 


Ses références pointues dans le milieu du rap et ses connaissances bien précises de  l’Histoire de la culture Hip Hop, lui permettent d’enrichir son univers artistique et de transmettre ce savoir aux jeunes lors des ateliers de rap qu’il anime.

Persister est l’un des maîtres mot du MC perpignanais. Hassan part du principe qu’avec de la volonté, on peut réussir à atteindre son but. Sur Warm Up, on retrouve même un morceau intitulé « On persiste ». Et quoi qu’il arrive, il garde toujours l’esprit positif : «  Il y a toujours des haters qui critiqueront… Ils n’aiment pas mon maxi, ce n’est pas grave, ils aimeront le prochain c’est tout ! »

Hassan fait partie du nouveau souffle de rappeurs qui transpirent l’authenticité. Dans son rap, il relate la réalité de son vécu, de ce qui l’entoure, de ce qu’il connaît. Hassan se considère comme un chroniqueur de la rue et n’hésite pas à dénoncer ce que les médias ne dévoilent pas.

Il affirme que son but dans le rap n’est pas commercial. Son objectif est plutôt de faire kiffer les gens, faire passer des messages et se faire plaisir. Hassan pointe du doigt les majors, les labels qui sont axés sur l’aspect financier et qui s’enrichissent sur le dos de ceux qui travaillent dur pour réussir. « Je pourrais être clochard ou Bill Gates pour moi c’est la même, c’est quelque chose que je trouve dégueulasse, qu’il faut décrier, qu’il faut mettre sur la table. »

Ayant évolué au sein de la Casa Musicale, Hassan salue l’initiative et l’investissement des associations qui se battent pour donner la chance aux artistes de se professionnaliser. Il tient beaucoup à son côté indépendant dans le rap : « Avec une major, mes sons seraient commercialisés… Ok, mais je n’ai pas besoin d’eux, à l’heure d’internet, nous pouvons le faire par nos propres moyens. Donc à part concéder 50 % de mes droits, je n’y gagne rien moi à signer en major ! »

Hassan se démarque par son engagement. Il revendique ses opinions, il fait du rap et prend position. Son slogan, issu d’une de ses punchlines : « Parce que le rap sans texte, ça ne reste que du bruit » en est l’exemple. Cette phrase phare n’est pas une provocation envers certains MC’s, mais plutôt le moyen d’affirmer ce qu’il fait. Hassan prône le sens des textes : « Même si  tous les rappeurs ne sont pas axés sur le texte, nous ne sommes pas là pour dire n’importe quoi au micro. Je pense qu’il faut garder une cohérence, et même si ce n’est pas du rap conscient… ».

Fidèle à ses convictions, Hassan incite au militantisme et condamne l’individualisme ambiant. Il pousse à l’engagement et souhaite faire prendre conscience aux gens qu’il faut croire en ses idées et aller jusqu’au bout. « Lorsque l’on monte sur scène, on demande au gens de voter, non pas parce que c’est un devoir de citoyen, mais pour que nos gosses ne vivent pas sous le règne de Le Pen ! »

Deux Master 2 en poche, en droit et en sciences politiques, ce punchliner est très attentif à la politique, qui perçoit comme obligatoire, indispensable, mais malsaine. Il craint énormément l’endoctrinement des populations, la domination du peuple… Selon lui, la crise actuelle n’est qu’une simple façade. « On a vraiment l’impression que ça va mal, etc. Il faut arrêter, la France va très bien, je ne pense pas que le mec qui mangeait hier, ne mange plus aujourd’hui. A chaque époque c’est la même merde… peut être différente, mais c’est la même merde ! »

Cash et déterminé, ce MC de Perpignan, nous a fait part de sa volonté de rédiger personnellement un article pour Hip Open, à l’approche des élections présidentielles… En attendant, son EP Warm Up est disponible en téléchargement gratuit sur le net. Bonne écoute !

 

 

 

> Pour télécharger Warm Up, cliquez ici !

>> Pour plus d’infos : le blog du MC Hassan

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« Parce que le rap sans texte ça ne reste que du bruit ! »
Hassan

ÉKOUÉ (La Rumeur)

Ekoué, présent lors de la projection de De l’encre, dans le cadre du festival Hip Hop Addict, organisé par la Casa Musicale à Perpignan, explique ses choix à la fin du film, avant de nous accorder une interview…

« Ce film est un hommage au rap féminin. Nejma n’est pas une actrice mais une rappeuse. De toute façon, on retrouve un peu de vécu dans chacun des personnages. (…) Ce film, c’est aussi la rencontre entre le milieu amateur et professionnel. »

De l’encre en chiffres…

2 auteurs, réalisateurs : Hamé et Ekoué (La Rumeur), 1 an d’écriture, 18 jours de réalisation, 1 grosse pression… C’est aussi 2 récompenses, le prix du « meilleur long métrage francophone » et le « prix du public », décernées dans le cadre du Festival International du Film de Genève. 18, pour l’arrondissement de Paris, dans lequel le film a été tourné, notamment Porte de la chapelle, qu’Ekoué qualifie « du lieu de la naissance du Hip Hop à Paris ». Un film vu par 1 million de personnes et racheté par TV5 Monde.

« On ne fait pas du rap conscient mais plutôt du rap authentique ».

La Rumeur revendique le côté puriste et originel du Hip Hop, fortement lié au milieu underground du rap. Hamé et Ekoué expriment haut et fort leurs visions sur l’industrie de la musique, sur la politique, etc. Ils sont cash, et n’hésitent pas à dénoncer des pratiques et leurs auteurs, notamment Abd Al Malik ou encore Laurent Bouneau (directeur des programmes de la radio Skyrock), auquel ils reprochent  « de mettre le rap sur le trottoir », et s’exaspèrent de voir Pierre Bellanger, à la tête de Skyrock : « Ce mec a quand même été mêlé à des histoires de pédophilie ! Je vous invite fortement à vous renseigner sur cette affaire… ».

Hip Open l’a fait…

Entretien avec Ekoué

H.O : Pourquoi le passage du rap au  cinéma ?

Ekoué : Le cinéma, c’est le frère jumeau de la musique… Généralement quand tu produis un disque tu l’accompagnes de clips, donc d’images. Mais il est évident que pour le parcours de La Rumeur, pour que l’on nous prenne au sérieux, pouvoir investir ce terrain avec soin est important. Cela permet d’élargir notre champ artistique et de s’essayer à d’autres univers. C’est complémentaire… L’approche est différente mais le fond et la nature de nos propos restent inchangés quelque soit le support. On a écrit le film comme on conçoit un album, c’est-à-dire avec une cohérence, en s’inspirant d’une réalité que l’on peut décrire. Tout rappelle notre quotidien, que ce soit au niveau du grain, des couleurs, de la chaleur… Le côté proximité, par les plans serrés, montre cette approche en phase avec la vie, avec le quotidien. Après, un film appelle à plus de compétences mais au niveau de la conception, c’est tenir une histoire et raconter quelque chose, produire un discours. C’est aussi faire partager une tranche de vie en 1h30, et c’est ce que l’on s’efforce à faire sur un album.

Dans le rap de Nejma, on retrouve également la touche « La Rumeur », c’est pour le film ou c’est propre à elle ?

Pour la cohérence des dialogues, nous avons écrit ses textes, bien qu’elle soit une rappeuse confirmée (ndlr : plus connu sous le nom de La Gale).


Pourquoi avoir choisi ce thème ? Et comment perçois-tu le ghostwriting dans le rap ?

Le thème est venu spontanément. Pour un premier film, nous souhaitions rendre hommage au milieu qui nous a vu naître, en l’occurrence le milieu hip hop et le 18ème.  En ce qui concerne le ghostwriting, eh bien… L’essence du rap, c’est d’écrire ce que tu veux, mais de parler de ce que tu connais ! Mais le ghostwriting est une pratique qui existe. Heureusement, elle n’est pas très répandue en France, contrairement aux Etats-Unis où elle est beaucoup plus acceptée. Les rappeurs se refilent les textes entre eux et ce n’est pas du tout un tabou. Mais quelqu’un qui est issu de l’underground, qui est face à une réalité qu’il a envie de raconter, je pense que son premier réflexe c’est de parler seul et en son nom, et pas forcément d’être dans l’interprétariat.

Venons-en à la relax après ce procès de 8 ans, suite à la plainte du ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy… Que penses-tu de tout ça maintenant ?

Cette plainte fait référence à un texte qui dénonce les bavures policières. Il faut savoir que nous sommes allés jusqu’en cassation, ce qui est extrêmement rare pour ce genre d’affaires. Nous avons dû payer 70 000 € de frais de procès… Actuellement, nous préparons un nouveau documentaire qui retrace les longues années du procès de La Rumeur face à Sarkozy. De nombreuses interviews ont été réalisées pour apporter des réponses sur l’affaire… La Rumeur doit faire face à du lobbying, des coups de pression mais le Hip Hop c’est prendre des risques donc je ne fermerai pas ma gueule pour autant. D’autres groupes se font attaquer en justice, se font censurer, c’est un phénomène qui se produit de plus en plus… C’est comme ce qui est arrivé au petit groupe de jeunes, la Sexion d’Assaut, je trouve ça assez scandaleux la façon dont les médias se sont déchaînés sur eux et les ont empêchés de faire leur musique. Le rap, c’est comme dans la vie, des fois tu dis des choses pertinentes, des fois tu peux dire des conneries mais ça ne justifie pas le fait de les mettre à poil sur la place publique et de les déglinguer à coup d’associations et tout… J’ai trouvé, le procès qui leur était intenté, disproportionné, dégueulasse et ça m’a bien énervé, c’est complètement scandaleux !

Tu disais tout à l’heure que les ateliers d’écriture sont ta plus grande fierté donc quels conseils donnes-tu aux jeunes qui se lancent dans le rap ?

Moi, les conseils que je peux leur apporter… S’ils sont à l’école, c’est d’y rester parce que contrairement à ce que l’on veut nous faire croire, je pense que la réussite elle est dans les deux : la démonstration d’une pratique artistique cohérente et l’acquisition d’un savoir institutionnel. Au bout d’un moment, quand tu es confronté à une réalité où l’argent t’arrive d’un coup, tu auras toujours besoin, soit d’une issue de secours, soit des réflexes pour anticiper et mieux transformer tes options. Donc c’est vraiment le seul conseil que j’ai à leur donner. Après ceux qui ont un travail ou qui font autre chose, c’est bien mais faire du rap de façon stricte et unique sans aucun bagage derrière, c’est suicidaire. 100% des rappeurs que je connais, qui ont connu le succès et qui ont fait ce choix là, aujourd’hui, ils n’existent plus et sont dans des situations de très grosse précarité. Prenez votre temps pour faire le taf !

Depuis l’époque du Poison d’avril, il y a eu beaucoup de choses qui se sont passées… Est-ce tu aurais pensé écrire et réaliser un film ?

On a formé La Rumeur en 1996 et avec Hamé, on s’est toujours dit que l’objectif serait de faire un film. On savait que ça allait être long, en tout cas, nous voulions déjà mettre un pied dans ce métier. De toute façon,  La Rumeur, c’est une démarche qui s’inscrit dans le temps, c’est un crescendo, ça vient petit à petit… J’aurais voulu avoir des exemples de la Old School… Je suis bien content de voir ce qui arrive à Joey Starr, parce qu’il cartonne dans le cinéma.  A part NTM, franchement les autres de ma génération… Tu vois des mecs comme I AM par exemple, ils ne m’intéressent pas, je ne les regarde pas comme des grands frères… Je veux que les jeunes qui arrivent soient conscients de la réalité. Qu’ils puissent se dire que La Rumeur a réussi à produire un nouveau modèle économique. Parce que la réalité c’est ça, pour sortir du ghetto, il ne suffit pas de parler,  ni de faire les militants, c’est-à-dire écrire des textes sur Malcom X ou autre… Mais plutôt démonter ta capacité à faire de l’argent et en faire beaucoup. Je ne suis pas Besancenot, bien que je sois sensible à un discours qui mette en avant les classes laborieuses et populaires mais je suis aussi dans une idéologie de survie, de combat et de réappropriation économique avant tout, en corrélation avec un discours politique, avec un discours social, avec un discours de fond. C’est dur, c’est difficile à faire parce que ce ne sont pas forcément les voies pavées de roses qui te permettent de toucher le succès… Le succès c’est la légèreté, la futilité par définition. Et quand, justement tu arrives à créer une interaction entre les deux avec du temps et à produire, c’est forcément plus solide, puis ça s’inscrit dans le long terme… Tu crées des exemples. Je suis allé aux Etats-Unis… J’ai vu que les noirs américains ont compris une chose : il faut faire naître des vocations. J’ai rencontré des hommes d’affaires, notamment un à Atlanta, un multimillionnaire qui rachetait des buildings… Tu descendais au sixième sous-sol, et là il y avait un parterre de 30 mètres de long avec plein d’ordinateurs et avec que des petits mecs du ghetto devant les écrans. Ils étaient là pour  passer les concours des plus grandes universités américaines. Il me montrait, lui, il va à Berkeley, lui, il va à Harvard… En France, on nous parle de la diversité, etc. Non, il faut créer des exemples à partir de ce que l’on est, à partir de notre histoire ! Moi je ne suis pas un mec qui gueule dans un micro… Non, il faut apporter la preuve de la réussite par le profit aussi. Malheureusement, nous sommes dans une économie de marché, nous sommes dans un système libéral, j’invite donc les jeunes à faire des études, évidemment, mais dans le but de faire de l’argent. S’ils n’en font pas en France, qu’ils aillent travailler à l’étranger, dans les pays où ils seront valorisés.

Nous sommes dans un système où il faut faire de l’argent mais est-ce vraiment la seule solution ?

Non j’dis pas que c’est la seule… Quand je vois le mec, auquel je faisais allusion, ce multimillionnaire, avec sa force économique,  ce qu’il arrive à créer à destination des gens les plus précaires, je me dis « oui » c’est à ça que doit servir l’argent ! Ce n’est pas de l’argent pour rouler en Lamborghini et pour porter des Rolex, ça j’veux dire, tu fais ce que tu veux mais moi personnellement je m’en fou. Après je ne dis pas que ce n’est pas une finalité en soi, c’est à chacun de voir… Maintenant je suis une personnalité publique, ma démarche est écoutée et j’ai besoin de créer et de faire naître des vocations et d’incarner un certain exemple de ce point de vue là… En montrant que l’on peut réussir en faisant de l’argent avec un discours cohérent.

>> Article de présentation de De l’encre par Hip Open

>> Plus d’infos surhttp://www.la-rumeur.com/